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L'horreur coulissante
Elle aurait pu renier sa victoire, demander pardon,
mais elle va juste suspendre un peu les légitimités:
le monstre a faim de chair fraîche.
Son langage, autrefois optimiste,
tourne à présent autour de l'idée que tout le monde est vieux,
trop vieux, qu'il n'y a plus rien à faire.
Il a l'air bien silencieux celui qui était venu
nous expliquer que chez lui on tuait les gens
et que cette vision l'avait rendu plus mature.
Adulte, il a trempé dans le massacre
et trouvé une issue salvatrice, véhiculant en lui,
à sa sortie du combat, les miasmes de la cruauté.
Alors je préfère encore que sa femme dise
que désormais tout est devenu vieux, la jeunesse,
mais aussi les miasmes de l'indicible cruauté.
Mais le sens de la vie va toujours quelque part.
On ne peut pas se contenter d'être vieux,
laissant simplement le gouvernail aux jeunes.
Un mot parfois peut faire la différence
entre une situation et une autre:
adulte est un mot devant finir par s'associer avec responsabilité.
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Entre ciel et terre
Si tu dois encore rencontrer ma part innocente,
ne sois pas pressé, tu pourras,
quand l'autorisation viendra,
remonter le fleuve avec moi.
Mais peut-être, justement,
l'impatience de concrétiser au plus vite
une aventure, découle-t-elle d'un plan
pour laisser ici quelques traces.
Ou est-ce pour t'accorder au temps qui passe,
que tu fixeras en collections secrètes
les moments volés
toujours bons à prendre, s'il y en a.
Moi je réfléchis selon le théorème du cercle,
en termes d'équilibres étroits,
de forces amies,
dans la réserve naturelle de la sensibilité.
Et si je reste ambiguë c'est en nageant,
par les souvenirs que je dirige,
dans l'eau bleue d'une révérence,
tel est l'ordre de mes pensées.
Ne te révolte pas contre les âges démodés
de mes suppositions!
Je connais ta préférence
pour les turbulences excentriques de la jeunesse.
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En exploitant la vie
Ma fantaisie n'avait pas de limite
je te cherchais souvent
mais je pensais que c'est toi
qui aurait franchi le premier pas,
comme l'autre fois, dans l'autre histoire,
ou du moins pour en éviter si possible
les conséquences fâcheuses,
les anomalies gâchant les équilibres.
Tu n'étais pas encore là, et moi,
j'avais bien épié les faits et gestes
de celui qui m'avait si bien plu
que le courage fut trouvé pour agir.
Pour agir et s'approcher, ne pas traîner,
le courage un peu fou d'une personne déchaînée,
si douce, si habile et farfelue,
mais si vulnérable d'exposer sa liberté.
Ainsi je frissonne à l'idée de ce courage des gens pieds nus,
qui se livrent entièrement par leur façon d'agir,
utilisant pour leur mouvance la plénitude d'esprit
et des énergies telluriques encore à exploiter.
Le courage de ceux qui partent de zéro,
générant de leur présence physique un élan vital,
visant une certaine efficacité fraternelle,
sans jamais céder à la tentation de démissionner.
L’autre fois nous nous étions arrêtés trop tôt,
sans arriver à consolider dans l’aventure,
l’espace adjacent au souvenir, celui d’un partage,
parce qu’à force de payer je me suis consumée.
Quand on revient, on hésite un peu,
sachant d'avance qu'on devra accepter de rémunérer
tous les éclats de lumière, le droit de traverser les terrains,
ainsi que tous ceux qui calculent le prix de l’entreprise.
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Malchance ou maléfice?
J'ai déposé dans l'urne
les mots si bien choisis
illustrant les fables de l’intérieur
vêtues de leurs soyeuses vraisemblances.
Or quand tout devait filer
tout droit vers un accomplissement
une torsion s'est subitement produite,
une déformation de la chance.
Alors j'ai cherché tout autour
les traces des causes possibles
de ce glissement de terrain
entraînant la désarticulation du discours.
J'ai perçu qu'à l'origine de l'origine
tout était blanc, pur, innocent.
J'ai distingué des ombres aplaties
regroupées derrière la maison.
Si nombreuses et si rapprochées,
si sombres et pointues, mais intelligentes.
Comment deviner qu'elles étaient
à ce point maléfiques ?
A ce point qu'on en arriverait
à courber la tête, courber le dos,
et regretter d'avoir cru à la liberté,
celle qui permet de parler de soi, tout simplement.
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Galaxie externe
Avoir de la prestance dans l'apparence,
au moins en début d'activité,
au moins s'il s'agit de festivités,
de mouvances crépitant au grand jour
grandies par l'audace scénique.
Céder aux urgences
d'un bon goût souverain
mais segmenté par le hasard
sillonné de la tempérance
qu'il t'aurait fallu administrer.
Non tu ne l'expliquais pas aux anges,
tu ne le laissais pas deviner,
tu croyais mettre des lumières
alors que tu effaçais le chemin
en affaissant les ornières.
Et que de bruits dans les discours
si criants de poésie
si muets dans les fondements
et que de persiflages aux alentours,
que d'animaux blessés, haletants.
Et que de guerres inachevées
que de sensations éparses,
déteintes dans l'âme
à force de matérialiser la bonté
dans un souvenir qui ne peut la porter.
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